betrayer ϫ aedan

il y avait des dizaines de raisons pour lesquelles tu n'étais pas venu avant ici. déjà parce que tu étais encore aujourd'hui aussi profondément qu'on pouvait l'être dans le déni, mais tu essayais de te soigner. ensuite, il y avait ton emploi du temps, surchargé comme jamais. et puis, il y avait les migraines, les insomnies, toutes ces choses qui te poussaient à simplement rentrer et retrouver ton chat lorsque tu arrivais enfin à t'échapper du boulot, parfois à des heures discutables. mais aujourd'hui, tout était censé être calme et tu avais décidé de repousser tes rendez-vous pour t'accorder une petite pause. on t'avait conseillé d'aller te faire masser ou regarder un film, ce genre de choses, mais lorsque tu étais sorti du petit restaurant où tu avais déjeuné, tu avais décidé de prendre la direction de la bibliothèque. tu devais commencer tes recherches pendant que ton cerveau était apte à ça et que tu t'en sentais le courage.

tu ne savais pas réellement pas où commencer, ni même ce que tu cherchais, pas une chose était certaine, ça concernait ton père, aussi il allait falloir que tu t'assures d'avoir la plus grande discrétion. tu aurais pu réquisitionner la bibliothèque et ses archives pour toi seul sur un claquement de doigts, mais c'était plus son style que le tiens, et ça ne te dérangeait pas de partager ta table avec un groupe d'étudiants ou un passionné de littérature. aussi, tu pousses la grande porte de la bibliothèque, une légère boule au ventre, avant de t'engager directement vers l'accueil. malheureusement pour toi, le bureau était vide, tu échappais un vague soupir un peu déçu, compréhensif néanmoins. personne ne pouvait passer sa journée collé à un bureau d'accueil, il ou elle avait forcément des choses à faire, tant pis, ça te donnerait l'occasion de farfouiller un peu avant de réclamer de l'aide. aussi tu t'élançais vers le rayon presse et commençait à farfouiller la presse nationale et internationale, lisant en diagonal pour trouver le moindre article qui pouvait concerner ton père ou - un peu malgré toi tu l'avoueras - sephiroth. mais si tes yeux s'arrêtaient de temps à autre sur quelques données de géopolitique, tu ne trouvais rien que tu ne saches déjà.

une bonne dizaines de minutes après avoir commencé tes recherches - dans la bibliothèque étonnamment vide et calme pour un début d'après midi - tu rangeais à sa place le dernier magazine que tu avais consulté, un nouveau soupir s'échappant de tes lèvres. c'était probablement peine perdue. tu ne trouverais aucune trace du moindre accroc ou de la moindre zone d'ombre, il fallait te rendre à l'évidence. de nouveau assis à ta table, tu faisais défiler ton téléphone, consultant les articles de la bibliothèque depuis son site web avant de réaliser que beaucoup des journaux ou livres qui auraient pu t'aider étaient consignés dans les archives, aussi ton regard se mit à balayer pour trouver le moindre employé mais à nouveau, il n'y avait personne à l'accueil. Tu te demandas quelques secondes s'il avait pu arriver quelque chose à la personne qui travaillait là mais jugea que c'était trop tôt pour t'inquiéter, et ton regard rencontra celui d'un jeune homme qui, de toute évidence, travaillait ici. Tu ne l'avais probablement simplement pas remarqué, ou alors il venait d'entrer. Tu n'en savais trop rien.

excusez moi !

tu venais de te lever, récupérant tes affaires et parlant aussi bas que tu le pouvais pour ne pas déranger les éventuels lecteurs que tu n'aurais pas vu entre les rayons. puis tu fis les quelques pas qui te séparaient de l'inconnu.

bonjour. j'aimerai consulter les archives de quelques articles de presse. c'est possible ?

les archives ne sont pas accessibles au public, il faudrait remplir des papiers pour avoir l'accès à ce que vous voulez ... ou alors ... non, l'accueil est vide.

bon, de toute évidence l'inconnu ne t'a pas reconnu mais tu ne lui en tiens pas rigueur, au contraire, tu préfères ça. tu lui lance un sourire tout mignon, ce sourire si sincère que tes yeux se ferment. bizarrement, tu saurais pas trop expliquer pourquoi mais il dégage de la chaleur qui te rassure, et qui te réchauffe. tu te sens tout léger soudainement. fiou, ça fait du bien. peut-être que c'est juste la présence d'un inconnu, peut-être que c'est sa timidité, peut-être que c'est le fait de pouvoir être toi même, peut-être que c'est tout ça. t'en sais trop rien, mais la réalité te rattrape soudainement.

sans indiscrétion, puis-je savoir pourquoi vous souhaitez les consulter ?

oui, pourquoi tu es. pour trouver des preuves, des indices contre ton père. et soudainement tu n'es plus vraiment sûr. tu détournes les yeux et ton sourire s'efface. ton cœur redevient lourd, c'est presque une pierre qui pèse trop lourd dans ta cage thoracique. probablement que si tu tombais à l'eau, tu coulerais avec un tel poids en toi.

je souhaite trouver certaines informations sur le président.

tu murmures, plus vraiment si assuré. tu veux pas passer pour un cinglé, ni même pour un psychopathe, mais tu veux pas non plus passer pour le fils prodigue qui veut faire un joli cadeau d'anniversaire à son père. soyons honnête dans l'instant tu tiens quand même plus du psychopathe. faut se faire une raison, même si ça fait mal de l'admettre. alors, tu restes de longs instants silencieux avant de relever les yeux vers l'inconnu. t'essaye d'être stoïque comme tu sais si bien le faire, mais tout ton être respire la détresse. t'as envie qu'il te dise non, et comme ça ce sera réglé, tu pourras pas t'engager dans cette voie. et pourtant t'as envie de savoir, t'as envie qu'on te tende la main et qu'on te dise que ça va aller. que tu fais le bon choix, que t'es pas en train de le trahir.

même si c'est exactement ce que tu fais.

c'est assez urgent.

tu sais pas pourquoi tu insistes, tu pourrais lui sortir ton nom mais tu n'as pas envie, tu t'efforces de serrer contre toi toutes les notes que tu as pu prendre. tu as juste la boule au ventre et envie de rentrer à la maison. t'as envie de te rouler en boule dans ton lit, ou de voir ton père et de faire comme si tout allait bien, mais il est à l'étranger en ce moment, alors de ce côté là, c'est cuit. mais s'il apprend ce que tu fais...